Bulgaria reconoce Kosovo (con minorķa gorani de fondo)

Osservatorio sui Balcani, balkans.courriers.info
La Bulgarie reconnaîtra l’indépendance du Kosovo
Traduit par Mandi Gueguen
Publié dans la presse : 20 février 2008
Mise en ligne : lundi 25 février 2008

Malgré ses réticences de départ, Sofia reconnaîtra dans les semaines à venir l’indépendance du Kosovo et participera à la mission de police et de justice de l’Union européenne, baptisée Eulex. Un changement de position qui laisse ouverte la question de la minorité bulgare vivant sur place.

Par Tanya Mangalakova

« La Bulgarie établira des relations avec les autorités kosovares d’ici quelques semaines », a déclaré le ministre bulgare des Affaires étrangères, Ivailo Kalfin, le 18 février à Bruxelles, lors d’une rencontre avec ses homologues de l’Union européenne portant sur la déclaration unilatérale d’indépendance du Parlement de Priština.

« La reconnaissance viendra en harmonie avec la législation du pays », a-t-il précisé. « Une telle décision dépendra de l’évolution de la situation au Kosovo dans les semaines qui suivront. »

Il s’agit d’un cas sui generis, et cela ne devrait pas constituer de précédent pour d’autres cas similaires en Europe. L’indépendance du Kosovo est une conséquence de la dissolution de la Yougoslavie, qui a été accompagnée par une longue période d’administration et de contrôle par des puissances étrangères.

Selon le quotidien 24 chassa, la reconnaissance pourrait être effective fin mars. Le président bulgare Georgi Parvanov a déclaré que son pays ne devait pas s’empresser de reconnaître le Kosovo et que la position de Sofia dépendrait d’une série de facteurs, dont la mise en œuvre du plan Ahtisaari et le respect des droits de l’homme et des personnes d’origine bulgare qui vivent dans cette province.

Le Premier ministre Sergei Stanishev a affirmé que, pour la Bulgarie, il était important que l’Union européenne maintienne ses portes ouvertes à la Serbie.

Sofia participera à la mission Eulex avec trente hommes et selon les médias locaux, c’est le Bulgare Vihar Cherkezov qui sera à la tête des ressources humaines de la future mission civile et de police. Un consulat bulgare ouvrira par ailleurs ses portes à Priština.

Lors de la dernière rencontre des ministres européens à Bruxelles, les autorités de Sofia avaient affirmé que la Bulgarie avait fait de son mieux pour trouver une position commune sur le Kosovo parmi les États membres, même si, naturellement, la dissension s’est fait sentir lorsqu’il a fallu prendre une décision commune. Beaucoup d’hommes politiques européens ont déclaré que la reconnaissance serait une décision qui reviendrait à chaque État.

À l’instar de l’Espagne, la Grèce, la Roumanie, Chypre et la Slovaquie, la Bulgarie a dès le départ affiché des réticences sur la reconnaissance du Kosovo. Mais le lendemain de la proclamation de l’indépendance, elle s’est alignée sur la position des principaux pays de l’UE.

« L’indépendance du Kosovo était inévitable »

La majorité des hommes politiques et analystes du pays considèrent l’indépendance du Kosovo comme un événement inévitable. Parmi eux, Solomon Passy, chef du Comité politique international, a affirmé qu’il avait déjà prédit la séparation du Kosovo il y a dix ans. « Il s’agit d’une réalité à laquelle nous ne pouvons ni ne devons échapper », a-t-il récemment déclaré lors d’un entretien accordé à 24 chassa.

Selon l’eurodéputé socialiste Evgueni Kirilov, la Bulgarie devrait prendre son temps pour reconnaître le Kosovo. « La meilleure option pour le Kosovo était qu’il reste sous le protectorat de l’UE jusqu’à ce que les pays des Balkans occidentaux entrent dans l’Union européenne », a-t-il déclaré à la presse.

Plamen Yuroukov, leader de l’Union des forces démocratiques, soutient que le Parlement devrait discuter de la position bulgare, car la question est très délicate et extrêmement importante. Selon le Parti des citoyens pour le développement européen de la Bulgarie (GERB), dirigé par le maire de Sofia, Boyko Borissov, « la Bulgarie doit faire partie des principaux pays de l’UE à reconnaître l’indépendance du Kosovo ».

La minorité bulgare au Kosovo

De nombreux experts et politiques avertissent que l’indépendance du Kosovo ouvrira la boîte de Pandore qui provoquera bien d’autres problèmes dans les Balkans turbulents et dans le Caucase. Une semaine avant la déclaration d’indépendance kosovare, le 8 février 2008, a refait surface la question de la minorité bulgare vivant dans la province : les Gorani.

(Image JPEG)
Deux femmes Gorani au Kosovo

 

L’association culturelle éducative Ogniste, l’association Rodolubetz et le Comité Helsinki des Bulgares de Serbie ont lancé le 8 février une pétition sur Internet pour l’autonomie culturelle et administrative de la minorité bulgare. Plus de 550 Bulgares du pays et de la diaspora ont répondu à cet appel.

« Il existe des citoyens appartenant à l’ethnie bulgare au Kosovo et qui préservent depuis des siècles leur identité, leurs traditions et leur langue. Il existe deux ONG bulgares inscrites dans la province administrée par les Nations unies. Nos compatriotes vivent des provocations au quotidien. À ce jour, cinquante-deux attentats ont eu lieu dans la zone de Gora au Kosovo, sans qu’aucun coupable n’ait été désigné ni arrêté. Bientôt le Kosovo deviendra indépendant sous l’égide de la communauté internationale. Les Bulgares du Kosovo cherchent désespérément l’aide des institutions de Bulgarie pour la protection de leurs droits. »

La ligne politique de Sofia à l’égard de la minorité bulgare au Kosovo n’est pas claire. Bien qu’il y ait cinq bourses d’étude pour les étudiants bulgares du Kosovo, presqu’aucun jeune Bulgare venant du Kosovo n’étudie à l’université en Bulgarie. Les Gorani doivent attendre trois ans pour obtenir la nationalité bulgare. La pétition insiste sur la nécessité de faciliter la procédure concernant l’acquisition de la nationalité et la politique d’intégration culturelle et économique en Bulgarie, permis de travail et carte de séjour pour accéder au marché du travail local.

Les journalistes bulgares écrivent depuis le Kosovo sur une communauté de langue bulgare qui habite dans la région de la Gora et de la upa près de Prizren. « Les autorités de Sofia devraient se donner les moyens et faire pression pour protéger les intérêts des Bulgares du Kosovo, surtout au moment où Priština prépare une nouvelle Constitution, qui contiendra certainement des articles sur les minorités, y compris la minorité bulgare », ont déclaré les représentants des associations Gorani au quotidien Standart.

Le 17 février 2008, les médias locaux ont également évoqué la visite du diplomate bulgare Nikolay Koley à Priština, près du village de Granchare, dans la région de Podgor, tout près de Prizren.

Au Parlement, seul le VMRO, parti de l’opposition de droite, s’est engagé sur cette question. « Priština doit reconnaître les droits des Bulgares du Kosovo et cela devrait être la première condition que Sofia doit poser avant de reconnaître l’indépendance de la province », a déclaré Krassimir Karakaxhanov, leader du VMRO et membre du Parlement. Selon lui, plus de 14.000 Gorani d’origine bulgare vivraient au Kosovo aujourd’hui.