"Non, les Occidentaux ne doivent pas intervenir militairement au Moyen-Orient", Pierre Conesa

Par Pierre CONESA, le 15 septembre 2014, diploweb

Ancien haut fonctionnaire du Ministère de la Défense (France). Pierre Conesa est l’auteur de « La fabrication de l’ennemi ou comment tuer avec sa conscience pour soi », Paris, éd. Robert Laffont, 2011. Un livre recommandé par le Diploweb.com.

A l’occasion de la "conférence sur la paix et la sécurité en Irak" organisée le lundi 15 septembre à Paris, Pierre Conesa explique pourquoi une nouvelle intervention occidentale au Moyen-Orient ne lui semble pas la meilleure option."On ne peut intervenir dans une guerre de religion surtout quand on a contribué à la faire naître," écrit-il.

« NOUS ne laisserons pas EIIL créer un califat via la Syrie et l’Irak a déclaré dans une interview, le président américain a été publiée dans le New York Times du 9 août 2014. Attention Obama ne parle pas de la théocratie obscurantiste saoudienne qui a donné naissance au Salafisme, ni de l’Iran Khomeyniste qui le premier a mis en place une théocratie parlementaire. Il semble qu’il y ait consensus entre décideurs et experts sur la nécessité stratégique de contrer militairement « l’Etat Islamique » EIIL et le sommet de l’OTAN a affiché l’unanimité des pays membres, non pas tant à participer militairement mais au moins à soutenir la proposition de Barack Obama. Encore une déclaration unanimiste à vocation militaire ! En d’autres temps, rappelons qu’il était aussi absolument évident qu’il fallait frapper les forces armées du régime Assad, auparavant il avait été aussi urgent d’aller porter secours aux populations libyennes massacrées par le régime de Kadhafi. L’invasion américaine en Irak de 2002 pour renverser le régime de Saddam ne fut que mi-consensuelle puisqu’une moitié seulement des pays de l’Union européenne, suivirent G. W. Bush. Enfin la « mère de toutes les interventions de remise en ordre du Moyen Orient » fut l’opération otanienne pour renverser le système Taliban et ses horreurs, attraper Ben Laden et libérer les femmes afghanes. Bien avant à l’époque où les Stratèges parlaient encore « d’ingérence humanitaire », il y avait eu l’Opération Onusom en Somalie qui se termina par la mort en octobre 1993 de 19 GI’s et le départ de toutes les troupes occidentales. Il nous reste en chantier l’intervention militaire au Mali, devenue maintenant sahélienne puisque nos ennemis se moquent des frontières. Quel est le bilan de ces différentes actions militaires ?

D’abord dressons un rapide bilan des « opérations militaires consensuelles » menées depuis une quinzaine d’années : l’OTAN est en Afghanistan depuis maintenant 13 ans, alors que les Soviétiques n’y sont restés que 10 ans, avec un effort militaire supérieur (120 000 hommes plus les compagnies privées de sécurité) en ayant de plus étendu la guerre au Pakistan, ce que s’était refusé à faire Moscou. Le régime Najibullah laissé en place par les Soviétiques tint deux ans. Combien de temps peut-on espérer la survie du régime é »Karzaï ou avatar avant le retour des Taliban ? La Libye est dans le même état de déliquescence violente que l’Irak et a produit des métastases dans toute la zone sahélienne où nos troupes vont combattre (durablement on le sait maintenant) le « terrorisme international ». Les massacres du Damas se poursuivent sans les armes chimiques. La Somalie, dont plus personne ne parle aujourd’hui, produit elle aussi ses purulences au Kenya et en Ethiopie. Enfin l’Irak objet des réflexions actuelles, vit l’éclatement que sa composition religieuse laissait prévoir. La destruction militaire d’un régime dictatorial laisse un vide politique total que le gouverneur Bremer avait soigneusement organisé. Après la première phase militaire, il faut rapidement crier victoire comme le firent G. W. Bush à Bagdad en avril 2003 ou Sarkozy à Tripoli en mars 2013… et vite se retirer.

Précisons quelques abus de langage. L’opinion internationale ne se résume pas aux décideurs des pays occidentaux. Régis Debray rappelle que l’invasion en Irak en 2003 sans résolution de l’ONU a été menée par une coalition représentant moins de 9% de la population mondiale. L’Occident mène sa propre vision stratégique et quelle est-elle ?

Relativisons les arguments humanitaro-interventionnistes puisque la crise la plus meurtrière depuis 1991 est la crise du Congo (2,5 millions de morts, plusieurs dizaines de milliers d’enfants soldats et viols collectifs systématiques) qui n’a pourtant pas suscité le même émoi médiatique. Laissons également de côté les Droits de l’Homme qui sont un critère à géométrie variable, sinon les démocraties auraient depuis longtemps rompu toute relation avec l’Arabie saoudite qui, bien plus que Daesh, est disciple de la décapitation publique. A la suite de l’attaque contre la Grande Mosquée de la Mecque en 1979, soixante-trois rebelles avaient été décapités sur les places publiques de quatre villes saoudiennes, lors d’exécutions retransmises en direct sur la télévision. En matière d’intolérance religieuse, l’Arabie Saoudite n’a de leçons à donner à personne puisqu’elle interdit tout autre culte que l’Islam jusque et y compris dans les Ambassades. L’internaute Raef Badaoui, qui avait créé en 2008 un blog intitulé « Free Saudi Liberals », avait lancé un appel en faveur d’une libéralisation religieuse appelait seulement à une plus grande séparation entre la religion et la sphère publique. Pour les fondamentalistes, cela équivalait à une hérésie, et le cheik Abdulrahman al-Barrak qui, en mars 2013, avait lancé contre lui une fatwa, le considérant comme un « non-croyant » donc un apostat passible de la peine de mort. Ce cas vient s’ajouter à la longue liste des victimes du régime, tel l’écrivain saoudien Turki Ahmad arrêté en décembre 2013 pour ses propos postés sur le réseau social Twitter, contre les extrémistes qui « dévoient le message d’amour du Prophète et le transforme en message de haine ». Accessoirement rappelons que selon Amnesty, 80% des 778 exécutions capitales dans le monde (hors Chine) ont eu lieu en Iran, Irak et Arabie Saoudite, nos futurs alliés dans cette guerre contre la « Barbarie ».

Seuls dix pays occidentaux s’y collent : Etats-Unis, Grande Bretagne, France, Australie, Allemagne, Canada, Turquie, Italie, Pologne et Danemark. Cette coalition pèse moins de 10% de la population mondiale. Elle peut difficilement se présenter comme représentative de la « Communauté internationale ». Mais au Sommet d’Ottawa chacun des pays membres a bien insisté sur la nécessité d’une coalition régionale pour fournir des troupes sur le terrain. Il faut donc des alliés régionaux prêts à mettre des hommes sur le terrain !

Les forces combattantes opérationnelles sont de deux ordres : d’abord les peshmergas [kurdes] de Massoud Barzani constituent pour l’instant la seule force de frappe capable. Pour qu’ils le restent, il faudra leur donner des armes mais aussi et surtout des garanties politiques sur leur autonomie future. Que faire de Kirkouk, ville kurde, arabisé par le régime de Saddam et récemment reconquise ? Donc il faut leur demander leur aide sans l’indépendance. Un Kurdistan indépendant émargeant sur l’Irak et la Syrie irriterait Ankara et Téhéran. Depuis quelques jours le PKK d’Ocalan a également offert ses services. Voilà qui est de nature à rassurer la Turquie qui a pu mesurer sur le terrain la valeur militaire du PKK ! Problème le PKK est sur la liste des organisations terroristes de l’UE et ne peut donc pas recevoir d’aide militaire.

Depuis le début de la guerre en Syrie et bien sûr la prise de Mossoul par les Salafistes, en juin 2014, l’Iran ne cesse d’affirmer qu’il est le seul État à vraiment s’opposer aux « takfiristes », au « terrorisme sunnite radical » présenté comme le pire ennemi de l’islam, rappelle Bernard Hourcade [1]. L’Iran accusée encore de tous les maux il y a 6 mois, est maintenant courtisée par Washington et Moscou. Par contre François Hollande a déclaré que Téhéran pourrait participer à une conférence internationale sur la sécurité dans la région (ce qui lui avait été refusé à propos de la Syrie en décembre 2013), une fois la question nucléaire réglée. Les États-Unis, qui ont désormais des discussions bilatérales de très haut niveau avec l’Iran, semblent ne pas avoir entendu cette déclaration.

La Jordanie est un cas plus complexe. Le Royaume, déjà fragilisé par un afflux massif de réfugiés irakiens et syriens, par une situation socio-économique difficile et par l’épineux dossier israélo-palestinien, est un objectif de choix pour les dirigeants de l’Etat Islamique. Le Roi est conscient du soutien d’une partie de la population acquise aux thèses islamistes et qui abriterait même des cellules djihadistes « dormantes ». Logiquement, le monarque devrait être le premier à sonner l’hallali contre les djihadistes de l’Etat Islamique, d’autant qu’il peut se prévaloir de son statut de gardien des lieux saints musulmans de Jérusalem. Mais il est conscient du risque de voir la Jordanie basculer dans l’insurrection. Pour l’instant, il fait donc preuve de la plus extrême prudence, se contentant de déployer d’importants effectifs militaire face à la frontière irakienne désormais tenue par les jihadistes. Le Premier ministre jordanien a déclaré que la Jordanie ne faisait pas partie des 10 pays participants à la coalition annoncée par Barak Obama. Et les médias jordaniens sont allés dans le même sens : « la Jordanie ne participe pas à la guerre contre Daesh. L’opinion publique et le parlement aussi y sont opposés, car ils considèrent dangereux de combattre l’EIIL ». La société jordanienne sent le danger, car certains milieux soutiennent Daesh et même des jeunes, dans certaines villes, portent, facilement, le drapeau de ce groupe »" [2].

Autres alliés militaires possibles : l’Egypte et les pays d’Afrique du Nord qui se satisfont plutôt bien de l’appel au Jihad lointain qui attire leurs propres terroristes en mal de combat. Ils ont déjà suffisamment à faire avec la situation libyenne. Leur problème comme celui des Occidentaux consiste à faire pour que ceux-ci ne puissent pas revenir semer le désordre chez eux (scénario afghan bien connu).

Reste alors les principaux pays directement concernés par Daesh mais qui se gardent bien d’avancer des propositions militaires sérieuses.

L’Arabie saoudite, maison mère du Salafisme Jihadiste, a créé un Frankenstein dont elle redoute depuis quelques années l’effet boomerang. Aujourd’hui, les dirigeants du royaume semblent divisés sur la ligne à adopter, conscients qu’un certain nombre de fondations privées saoudiennes ont financé les djihadistes combattant en Irak et en Syrie, et que la seule priorité stratégique de la famille régnante reste d’assurer la pérennité de la monarchie – inconciliable avec l’idée de Califat – et la stabilité de la péninsule arabique. Craignant une contagion du Printemps arabe (autre risque), le royaume avait intensifié sa campagne contre… les militants des droits de l’Homme et les organisations internationales. Riyad classe à parité les Frères musulmans, Daech, Al-Nosra et le "Hezbollah en Arabie saoudite" comme "organisations terroristes. Le "Hezbollah en Arabie saoudite" est un groupuscule clandestin chiite (Houtis) qui s’est manifesté quelque fois dans le passé et qui serait appuyé par l’Iran, la Syrie et le Hezbollah libanais. Les Houthis sont les rebelles chiites zaïdites qui contrôlent des régions du nord du Yémen proches de la frontière saoudienne. Comme les Jordaniens, les Saoudiens ont déployé 30 000 hommes face à la longue frontière irakienne. Mais accueilleront-ils des réfugiés eux qui ont l’argent et l’espace ? [3]

Enfin le Qatar continue sa guerre privée contre Riyad par Frères musulmans interposés et crise égyptienne. Nouri Al Maliki ancien premier ministre, avait déclaré « Ces deux pays (Arabie saoudite et Qatar) sont les premiers responsables des violences entre communautés, du terrorisme et de la crise de sécurité en Irak", affirmant que Ryad et Doha fournissaient un soutien politique, financier et médiatique aux insurgés et accusant les deux pays d’"acheter des armes au bénéfice des organisations terroristes » formule exagérée probablement dictée par l’amertume de quitter le pouvoir.

Quelle est la situation politique réelle de la région ? Les crises du Proche et du Moyen Orient font apparaitre que le monde arabo-musulman est plongé dans la plus grande guerre de religion que l’Islam ait jamais connue. Neuf pays sont frappés par les violences entre Sunnites et Chiites : l’Afghanistan, le Pakistan, la Syrie, l’Irak, le Yémen, le Liban, la Malaisie, la Somalie et Bahrein [4]. En découle une situation nouvelle et inquiétante pour Riyad écrit Peter Harling dans Le Monde diplomatique de septembre 2014 : la majorité sunnite dans la région développe un complexe minoritaire, sentiment confus mais puissant de marginalisation, de dépossession, d’humiliation. Ils se croient et se disent privés de leurs droits élémentaires et persécutés.
Les guerres de Syrie et d’Irak sont instrumentalisées dans le conflit politique qui oppose les deux puissances régionales- Iran et Arabie saoudite- après le retrait des troupes des États-Unis et de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN). Cette période de « guerre froide » a échappé à tout contrôle. L’Iran s’est discrédité en Syrie et les monarchies arabes ont été incapables de se faire entendre de leurs « Frankenstein » désormais largement indépendants. L’État islamique ne menace plus seulement l’Irak, mais aussi l’Iran chiite et surtout l’Arabie saoudite, contrainte de revoir drastiquement sa politique et ses alliances. Téhéran estime que la balle est dans le camp des monarchies arabes et espère que les Occidentaux useront de leurs relations avec les familles régnantes pour les inciter ou les contraindre à cesser leur soutien aux mouvements sunnites radicaux. Riyad espère que les Occidentaux viendront seuls combattre EIIL pour ne pas avoir à s’allier avec Téhéran.

Quelle va être l’écho de cette « nouvelle croisade » principalement menée par les forces occidentales ? Le Salafisme, pur produit des madrasas saoudiennes, est une secte apocalyptique convaincue que la fin du monde est annoncée et que seule la rédemption par une pratique littéraliste de la religion permet au croyant d’être sauvé. Fidèle au livre de Jezechiel, les téléprédicateurs salafistes annoncent le combat final des armées de l’Antéchrist, contre le Messie [5]. Selon eux la prophétie est en train de se réaliser avec cette nouvelle invasion des Mécréants. Le Salafisme avait déjà fourni les Taliban, Al Qaida, la guerre civile en Algérie et au Pakistan, les destructions des sites cultuels malékites au Mali... Pourtant jamais la cible n’a été nommée par les Occidentaux. Le Grand Mufti de la Mecque, Abdul Aziz Al-Asheikh, grand expert en la matière, a déclaré pour sa part que « l’extrémisme et l’idéologie de groupes tel que l’Etat Islamique sont contraires à l’Islam, sont le plus grand ennemi de l’Islam et les musulmans en sont les premières victimes ». Il a raison mais un peu tard. Comme le montre la base de données de l’Université du Maryland, aujourd’hui le terrorisme tue dix fois plus de musulmans que de non-musulmans en grande partie parce que tous ces défenseurs de « l’Islam véritable » se battent entre eux. Les forces de l’EIIL sont en guerre contre Al Nosra, Trade mark local d’Al Qaida, dans des accrochages qui auraient déjà fait près de 6 000 morts. « Contrairement à Jabat al-Nosra qui se revendique comme la branche officielle d’Al-Qaïda en Syrie et est reconnue comme telle, l’EIIL n’a aucun lien avec l’organisation transnationale. L’Etat islamique en Irak et au Levant a, en fait, intégré les héritiers d’Al-Qaïda en Irak sans nouer de lien avec ce mouvement. "La branche d’Al-Qaïda en Irak était un peu considérée comme son enfant terrible et cela a plutôt arrangé le mouvement de les voir rentrer dans une autre organisation", explique Romain Caillet. On peut supposer que l’autoproclamation d’Al Baghdadi comme Calife, qui appelle les autres groupes à lui faire allégeance, va susciter d’autres rivalités. La « Sainte Alliance » régionale difficile à construire donc ! Et il est probable que les forces occidentales seront bien seules une fois de plus.

Bref l’Islam politique est en train de mourir sous nos yeux. Avons-nous à choisir entre radicaux sunnites et radicaux chiites ? Nos chancelleries ont elles pris la véritable mesure du phénomène au point de croire pouvoir peser dans ce conflit ? « Le plus inquiétant, peut-être, c’est que l’Etat islamique est devenu le cache-sexe d’une vacuité politique généralisée » écrit Peter Harling « S’ensuit une série d’aphorismes plus absurdes les uns que les autres. L’Iran à l’Occident : aimez-nous parce que Daesh nous menace. Les régimes arabes à leurs peuples : on ne cédera sur rien parce que Daesh nous menace. L’opposition syrienne : sauvez-nous de nous-mêmes parce que Daesh nous menace. Le Hezbollah aux Libanais : tout est permis parce que Daesh nous menace. Les Etats-Unis : on n’intervient pas en Syrie parce que Daesh nous menace, mais on frappe en Irak parce que... Daesh nous menace ».

 L’outil militaire ne donne pas des résultats très positifs. Peut-être parce que dans la continuité de la pensée stratégique des néoconservateurs, il tient lieu de politique. Même les outils les plus modernes qui paraissent préserver nos forces comme les Drones suscitent des réactions des populations bombardées. Faut-il s’en étonner ? On le constate tous les jours au Pakistan ou à Gaza. Les bombardements américains ne sont pas neutres pour autant. Vus de la région, ils ont le sens contraire à celui qu’on croit. Par le hasard du calendrier macabre des tueries proche-orientales, ils surviennent après un mois de désintéressement aveugle de Washington et de Paris pour le sort des civils sous les bombes à Gaza. Ils envoient aussi un message très clair aux acteurs de la région : le bon dosage par certains de la « guerre contre le terrorisme » et de « protection des minorités » sert à capter et à mobiliser la puissance américaine ».

Au moment de l’invasion américaine en Irak, on avait compris que pour G. W. Bush, la guerre n’était plus la continuation de la politique par d’autres moyens, mais la continuation d’une non-politique. Il n’est aucun exemple qu’une aide militaire limitée ne devienne pas rapidement une co-belligérance et donc une partie au conflit. C’est ce qui va se passer avec le risque terroriste sur le territoire des pays occidentaux. Nous avons l’expérience du soutien militaire français à Saddam Hussein contre l’Iran de Khomeiny avec les attentats de la rue de Rennes en 1986, et les attentats de Madrid et de Londres (respectivement 191 et 52 morts), avaient pour but de punir les deux pays d’avoir participé à l’invasion de l’Irak. Nos salafistes jihadistes nationaux, peuvent dorénavant partir combattre en Syrie ou en Irak, ou décider d’agir seuls sur les bases arrières par solidarité. La sinistre liste est déjà longue : Zacarias Moussaoui, Richard Reid, Mohamed Merah, assassins du soldat britannique en pleine rue à Londres, attentat à la voiture incendiaire à l’aéroport de Glasgow…). L’intervention militaire accroit le risque terroriste intérieur. L’abstention ne garantit pas totalement mais limite la mobilisation : les attentats de Paris organisés en 1994 étaient « motivés » par la soi-disant collaboration entre Paris et Alger et l’attentat de Boston de cette année commis par les frères Tsarnaev devait punir …les massacres russes au Caucase. Aujourd’hui nos candidats au Jihad en Syrie expliquent leur engagement par la reculade française malgré les menaces militaires à l’encontre du régime d’Assad. Le danger est donc intérieur d’abord et pas moyen oriental.

On ne peut intervenir dans une guerre de religion surtout quand on a contribué à la faire naître. A l’époque de nos propres guerres de religion, la Divine Porte avait pris position pour les Protestants contre les puissances catholiques. Je ne crois pas que cela lui ait rapporté grand-chose. Par contre, après deux siècles de massacres et de guerres, les Occidentaux découvrirent les vertus de la tolérance. Est-il inévitable de passer par la guerre pour aboutir à cette conclusion ? Peut-être.

Cette analyse n’est pas destinée à ne rien faire. Il est en effet indispensable d’aider et protéger les minorités ethniques et/ou religieuses prises en étau dans ce conflit dont elles sont les victimes collatérales toutes désignées.

Pour se rendre véritablement utiles, les chancelleries occidentales pourraient plutôt s’engager dans le vieil abcès de la question palestinienne : 47 ans d’occupation et une colonisation qui se poursuit. Le voyage du président français à Bagdad, doublée d’une déclaration d’action en Libye, serait-il une façon de masquer l’urgence des problèmes du pays dans des envolées internationales ?

Copyright Septembre 2014-Conesa/Diploweb.com

[1] /orientxxi.info/magazine/l-iran-face-a-la-menace-de-l-etat,0661

[2] french.irib.ir/analyses/articles/item/340089-rencontre-secr%C3%A8te-obama-roi-hach%C3%A9mite-sur-l-eiil-par-abdul-bari-atwan

[3] lorientlejour.com/article/857769/riyad-classe-les-freres-musulmans-daech-et-al-nosra-comme-organisations-terroristes-.html

[4] Discours de l’Aga Khan, chef des Ismaéliens, devant le Parlement canadien

[5] Comment expliquer que dans deux conversations avec Jacques Chirac, G. W. Bush fasse lui aussi référence aux deux agents de l’Apocalypse pour entrainer la France dans la guerre en Irak. Gog et Magog sont-ils des agents de l’Impérialisme ou du Salafisme ?