´Moldavie: protestations contre la présence militaire russe en Transnistrie´, Anaïs Marin

Moldavie: protestations contre la présence militaire russe en Transnistrie

Par Anaïs Marin (Sources: tol.org, setimes.com, russiaprofile.org, protv.md, adevarul.ro)

Dépêche publiée le 10/01/2012, regard-est

Un incident «frontalier» a endeuillé le nouvel An en Transnistrie, ravivant les tensions avec Chisinau et les critiques sur la présence des forces russes de maintien de la paix dans la république autoproclamée de Transnistrie.

Enclavé entre le reste de la république de Moldova à l’est et l’Ukraine à l’ouest, ce territoire séparatiste s’étend sur la rive orientale du Dniestr (Nistru en roumain), fleuve dont l’un des ponts a été le théâtre d’un drame le 1er janvier. Vadim Pisari, 18 ans, apparemment ivre au volant de sa voiture, refuse d’obéir aux injonctions des soldats du check-point n⁰9 alors qu’il veut franchir le pont de Vadul lui Vodă pour rentrer chez lui à Pârâtâ. Il meurt un peu plus tard à l’hôpital des tirs de Kalachnikov qu’il a reçus dans le dos.

Le jour des obsèques une marche organisée en sa mémoire a réuni, outre le maire de Chisinau Dorin Chirtoaca et l’ancien président moldave Mihai Ghimpu, des centaines d’habitants des deux rives du fleuve, bloquant pendant 3 heures la circulation sur la route R5 qui relie le district de Dubasari à Chisinau. En même temps, d’autres manifestaient avec des banderoles devant l’ambassade russe dans la capitale moldave pour dénoncer la bavure, dans laquelle beaucoup voit une nouvelle provocation russe. Certains scandaient des slogans comme «L’armée russe –dehors!», «La Moldavie dans l’OTAN» et «Pour une union avec la Roumanie».

Force d’interposition en place depuis le cessez-le-feu de 1992, la mission de maintien de la paix en Transnistrie est composée de soldats moldaves, russes et transnistriens sous commandement russe. Leur mandat, contrôler et sécuriser les frontières, ne les autorise pas à arrêter sans soupçons valables un civil. Pour calmer le jeu, l’état-major russe a annoncé une réduction de son contingent à ce check-point, l’un des 15 qu’il administre le long du fleuve. L’incident a malgré tout ravivé un débat vieux de bientôt 20 ans sur le rôle controversé des soldats de la paix russes en Transnistrie, que certains voudraient voir remplacés ou secondés par des policiers sous mandat international de l’OSCE.

La Lituanie, qui présidait l’OSCE au deuxième semestre 2011, a tenté de relancer en novembre les négociations au format 5+2 (Russie, Ukraine, États-Unis, UE, OSCE, Moldova et République Moldave de Transnistrie), en panne depuis le référendum d’auto-détermination de 2006. En vain: même si les Occidentaux ont abandonné toute référence à «l’intégrité territoriale moldave» dans leurs documents, la Russie refuse de retirer ses troupes, comme prévu par l’accord d’Istanbul de 1999 sur la réduction des Forces Conventionnelles en Europe, tant qu’aucune solution politique ne sera trouvée entre Chisinau et Tiraspol. Cela permet surtout à Moscou de garder ce conflit «gelé» près du feu pour contrecarrer les aspirations européennes du gouvernement moldave et, surtout, son projet d’adhésion à l’OTAN.

L’affaire constitue un sérieux défi pour Evgueni Chevtchouk, fraichement élu à la présidence de la Transnistrie le 25 décembre dernier. Vainqueur du mafieux président sortant Igor Smirnov au premier tour, et du porte-parole du Parlement, Anatoli Kaminsky -le «poulain» du Kremlin- au deuxième, ce businessman de 43 ans a dit vouloir coopérer avec ses voisins pour réduire les barrières à la circulation qu’impose l’isolement diplomatique de la république et affranchir celle-ci de la houlette russe.